
Philippe Canceil (©JCB)
Philippe Canceil, maire de Labastide-du-Vert, le dit lui-même : « j’ai été un maire heureux et fier de servir ma commune et tous mes concitoyens ». Pour autant, l’élu qui ne sollicite pas le renouvellement de son mandat, ne cache pas son inquiétude quant au mode de fonctionnement du Grand Cahors, qui à ses yeux, oublie les enjeux de la ruralité.
Vous êtes maire de Labastide-du-Vert et vous ne vous représentez pas, dans quel état d’esprit avez-vous vécu ce mandat ?
Ces 6 années de mandat ont filé très vite et mon fils le plus jeune est passé de l’école maternelle au collège ! Je suis avant tout un citoyen devenu maire. Rien ne me prédestinait à occuper cette fonction. Je l’ai vécue avec un dévouement au quotidien pour les habitants de mon village, pour faire avancer mes idées sur les écoles rurales, la ruralité en général mais aussi nos engagements pour préserver la biodiversité, particulièrement la biodiversité nocturne, nous sommes village étoilé 3 étoiles. Nous nous sommes également préoccupés de la transition énergétique et écologique en diminuant drastiquement nos consommations électriques, en produisant de l’électricité solaire sur notre commune, et en n’utilisant aucun pesticide ! Nous avons eu à cœur de nous poser des questions et de rechercher des solutions. Pour moi, les communes doivent être exemplaires et inclure dans leurs politiques locales, l’écologie, en pensant à nos jeunes qui feront le monde de demain. Nous avons eu 5 naissances sur notre village en 2019, c’est formidable pour nos écoles, mais il faut se poser chaque seconde la question : quel monde voulons-nous pour nos enfants ?
Qu’est-ce qui a motivé votre décision de ne pas vous représenter ?
C’était un choix partagé avec l’équipe municipale il y a 6 ans. Le précédent maire était resté 7 mandats, ce qui est vraiment trop ! J’avais donné ma parole de n’effectuer qu’un seul mandat, pour permettre le renouvellement et je tiens donc parole : l’équipe municipale actuelle se représente en grande partie, avec un conseiller tête de liste : le changement dans la continuité, c’est comme cela que je me représente la démocratie de proximité dans un village !
Quel sentiment éprouvez-vous à présent ?
Beaucoup de fierté d’avoir pu exercer un tel mandat, d’avoir pu défendre mes idées, ainsi que celles de beaucoup de Lotois au sein du département, de la région mais aussi à l’échelle nationale en ayant pu par exemple, interpeller le Président de la République, mais aussi le Premier Ministre et le Ministre de l’Education Nationale, sur le sujet des écoles notamment.
Comment décrivez-vous la mission de maire que vous avez exercée ?
Etre maire est une mission à plein temps ! Toujours exaltante, car les sujets sont diversifiés. C’est avant tout une mission vers et pour les citoyens : être à l’écoute, essayer de comprendre les enjeux et surtout trouver des solutions à chaque problème, pour chaque citoyen. Etre aussi facilitateur pour les associations : leur permettre de rayonner, de mener des actions vers les citoyens. Aujourd’hui, notre salle des fêtes est occupée presque toute la semaine par des associations et très souvent pleine, c’est une très grande réussite ! Faire vivre le village avec du Yoga, des cours de dessins enfants et adultes, de la Gym, des soirées conviviales autour d’un verre ou d’un repas, du théâtre, des conférences, des concerts était un pari que nous avons réussi avec les associations !
La politique d’aménagement du territoire menée par le Grand Cahors, est désastreuse, à mes yeux, pour l’avenir de la ruralité.
Qu’est-ce qui vous a été le plus difficile à vivre en tant que maire ?
Un des plus grands regrets aura été la Communauté d’Agglomération du Grand Cahors. Dès le début, nous avons compris que les enjeux et les projets ne correspondraient pas du tout aux besoins de la ruralité, aux besoins de nos villages ruraux. Pendant 6 ans, une politique centralisée sur la ville centre Cahors s’est développée, a mis en place des investissements souvent très importants en oubliant le tissu rural du territoire, soit plus de 90 % des communes. Une politique d’aménagement du territoire désastreuse au sein de l’Agglomération qui se traduit aujourd’hui par un Plan Local d’Urbanisme Intercommunal qui signera peut-être la fin programmée de la dynamique des nombreux villages ruraux, c’est désolant. Pour moi, cela traduit un manque de courage politique et de vision de notre ruralité vivante et dynamique de la part des élus à la tête du Grand Cahors.
Qu’est-ce qui vous a le plus enthousiasmé ?
A partir du moment où vous comprenez vite que vous n’aurez rien à attendre du Grand Cahors, alors vous travaillez au sein de votre village, au sein de l’équipe du Conseil Municipal pour faire émerger nombre de projets en mettant le plus souvent la main à la pâte ! Nous nous sommes retrouvés de nombreux samedis matins pour planter des poteaux, placer des tables extérieures, fixer panneaux d’informations, installer les radars pédagogiques, etc. ! Et toujours dans un esprit formidable de convivialité, au service du bien commun ! Je tiens à les remercier pour leur dévouement au quotidien toujours exemplaire et leur implication efficace, en croyant aux valeurs qui ont été les nôtres pendant 6 ans dans l’intérêt général qui a guidé nos décisions à chaque instant.
Pour votre commune et au niveau départemental, vous vous êtes fortement engagé en faveur de l’école en milieu rural, quelle est votre réflexion sur le sujet ?
Cet engagement avait déjà commencé avant mon mandat de maire au sein du Collectif CCSEV (Collectif Citoyen de Sauvegarde des Ecoles de Village), et a pris une dimension très vite importante au fil des années : soutien aux écoles menacées de fermeture alors qu’elles accueillaient encore beaucoup d’enfants, actions de solidarités dans toutes les écoles du département pour prouver que chacun est conscient de l’importance de chaque école, et pas forcément que de la sienne ! Manifestations départementales avec des milliers de participants et plus d’une centaine d’écharpes tricolores déposées au sol en signe de protestation contre les décisions de fermeture arbitraires d’écoles.
Pour créer une commune nouvelle, il faut que soient réunies un certain nombre de conditions.
Vous ne vous êtes pas lancé dans la démarche de création d’une commune nouvelle, pourquoi ?
Pour créer une commune nouvelle avec des villages voisins, il faut 3 conditions pour que cette création ait du sens et qu’elle trouve un écho favorable dans la population :
– une proximité géographique que nous n’avons pas avec les communes voisines, même celles de notre RPI, les trajets sont trop long,
– des projets communs ou des bâtiments ou emplois à mutualiser, or ce n’est pas non plus le cas. De fait, par notre éloignement, nous sommes autonomes et lorsque nous voulons mutualiser un employé municipal, cela se fait naturellement au cas par cas,
– des liens étroits entre les populations de chaque village pour que cette création ait du sens, soit comprise et bien vécu de la part des habitants.
A suivre… Deuxième volet, avec Martine Fournier, maire de Bellefont-La Rauze.