
À Toulouse, Jean-François Renac (au centre, en chemise grise) annonce trois mois difficiles pour les professionnels de l’événementiel. (©T.C. / Actu Toulouse)
« Nous sommes une filière en danger de mort, alors qu’il y a une semaine, elle était parfaitement saine. » À Toulouse, les professionnels de l’événementiel tirent la sonnette d’alarme. À l’initiative de l’ensemble des 200 acteurs de ce secteur en Haute-Garonne, un groupement informel nommé « SOS Events 31 » s’est formé suite à la crise du Coronavirus. Une démarche « collective et spontanée » pour faire face aux conséquences économiques du Covid-19.
« On l’a créé, lundi 9 mars 2020, car nous avions des remontées très inquiétantes de la part des professionnels. Il y a des annulations en cascade liées au Covid-19. Nos clients annulent tous les événements, y compris ceux de moins de 20 personnes. Tous les jours, la liste s’allonge, parfois même jusqu’au mois de juin », explique Jean-François Renac, dirigeant de la société Miharu, spécialisée dans l’organisation d’événements et de séminaires.
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Les hôtels se vident
Hôtellerie, traiteurs, agences d’événementiel… Personne n’est épargné dans le secteur, comme l’explique le patron de Miharu : « La situation se dégrade tous les jours. Avec les annulations ou les reports, nous prévoyons une baisse d’activité de 25 % sur l’ensemble de l’année 2020. »
Même constat dans les hôtels : « Sur le mois de mars, on observe une baisse d’activité de -25 % à -60 %. Elle se fait à une vitesse impressionnante », s’inquiète Olivier Thomas, représentant du Club Hôtelier pour la partie des chaînes hôtelières. « Aujourd’hui, il n’y a plus de nouvelles réservations, nous perdons celles déjà existantes et les hôtels se vident et nous ne pouvons rien y faire. »
Annulations en série sur l’ensemble de la filière
Les hôtels indépendants souffrent, eux aussi, comme l’explique Emmanuel Hilaire, autre représentant du Club Hôtelier :
Nous commençons à connaître des annulations : déjà 15 % par rapport à 2019. Nos projections sur le mois de mars indiquent que nous serons autour des 30 % d’annulation.
Le Club Hôtelier a d’ores et déjà fait une demande d’exonération des taxes de séjour, pour l’ensemble de l’année 2020, auprès de l’agence d’attractivité de la Métropole de Toulouse. « Nous souhaitons collecter cette taxe, sans devoir la reverser », explique Emmanuel Hilaire. Bien que rien ne soit signé, cette demande aurait été accueillie positivement de la part de la Métropole. Cette manne financière, qui représente environ 1,5 million d’euros sur une année pour la collectivité, aiderait ces établissements à sortir de la crise.
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Vers une crise économique généralisée
L’inquiétude est également partagée par les traiteurs. « Pour eux, on compte entre 60 et 100 % d’annulation jusqu’à la fin du mois de juin. Cela représente 25 à 40 % du chiffre d’affaires annuel de ces entreprises », annonce Jean-France Renac. Une situation jugée « dramatique » par Thomas Fantini, président du groupe Esprit Pergos :
Il n’y a plus rien, plus d’appel ni de confirmation. L’activité est morte pour les mois d’avril et mai. On commence déjà à voir des annulations pour juin.
L’activité des restaurateurs commence également à se dégrader, entraînant par la même occasion, un effet domino : « On le ressent cette semaine. Je pense que ce sera le prochain secteur à être touché. Dans ce mouvement-là, on embarque aussi toute la filière alimentaire. Il va y avoir une répercussion totale sur tous les secteurs d’activité. » Une crise généralisée, c’est ce à quoi s’attend Steve Gallet, fondateur de l’agence d’événementielle Very Well :
Nous avons tous conscience que l’on va subir une crise économique mondiale, qui va toucher tous les secteurs d’activité. Notre secteur est déjà impacté en amont, depuis une semaine, mais nous serons également touchés en aval puisqu’il faudra du temps pour redémarrer.
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Les entreprises veulent des dégrèvements et des exonérations
Du temps, c’est ce que demande également Jean-François Renac : « Nous avons une écoute bienveillante de la part des acteurs publics. Ils jouent le jeu. Cela dit, nous sommes dans une situation où nous demandons de l’oxygène pour tenir. Nous sommes conscients que certaines structures ne tiendront pas : elles sont déjà condamnées. Celles qui peuvent tenir doivent pouvoir le faire jusqu’en juin puis septembre. »
Plusieurs dispositions, dont des reports de paiement d’échéances sociales et/ou fiscales, ont été annoncés, mercredi 11 mars 2020, par Étienne Guyot, préfet de la région Occitanie et de la Haute-Garonne. Pour le groupement de professionnels, c’est encore insuffisant :
Avec les reports, on a seulement déplacé le problème. Il faut désormais passer à la phase 2, en envisageant des dégrèvements et de l’exonération sur toutes les charges fiscales et sociales. Les entreprises doivent avoir du temps pour recommencer à travailler. Nous souhaitons également que l’on réfléchisse à un état de catastrophe économique : une grande crise, de grands moyens de réponse, avec la mise en place d’un fonds de garantie au niveau national.
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Reprise de l’activité espérée en septembre
« Il y aura un après Covid-19. Et il faut le préparer dés maintenant », tente de relativiser Steve Gallet. Ces professionnels espèrent une reprise de l’activité d’ici le mois de septembre. Pour Jean-François Renac, à cause de toutes les dates reportées, il va falloir se creuser la tête :
On va reporter, au mois de septembre, des manifestations qui devaient avoir lieu aujourd’hui. Sachant que les derniers mois de l’année sont très chargés dans notre profession, on va devoir jouer à Tetris pour arriver à caser ces événements.
C’est dans ce sens que le dirigeant de la société Miharu réitère son appel à l’aide : « Donnez-nous de l’oxygène. Après la crise, il y a une reprise très forte dans nos métiers. Simplement, il faudra que l’on soit encore présent pour assurer la reprise », prévient-il. L’inquiétude est bien réelle dans le milieu de l’événementiel. Il y a tout de même une bonne nouvelle : aucune prestation pour des mariages n’a été annulée pour l’instant.
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